Ils font Saint Cloud 30/03/2021
Professeur de piano devenu une figure de Saint-Cloud, Pierre Faraggi est avant tout un pianiste fervent, soucieux de transmettre sa passion aux plus jeunes.
En se levant de son tabouret de piano, Pierre Faraggi a ce constat émerveillé : « Je travaille tout le temps… et je n’ai jamais été aussi heureux qu’aujourd’hui ». Il considère avec une incrédulité souriante le nombre d’années que lui assigne l’état-civil, et se félicite de la forme insolente qui lui permet d’enchaîner sans fatigue les leçons et les plages de travail personnel.
« Entrer dans la musique »
Aussi loin qu’il s’en souvienne, Pierre Faraggi a toujours voulu « entrer dans la musique », comme on entre dans les ordres – mais un ordre enseignant, alors, puisque cette authentique vocation s’est vite doublée de la passion de transmettre et partager. Pour rassurer son père qui s’inquiète de le voir se destiner à une carrière d’interprète, le jeune pianiste, reçu à l’École normale de musique de Paris où il sera le disciple d’Alfred Cortot, commence très tôt à donner des cours, et prend goût à la pédagogie.
Le savoir partagé
Deux épisodes marquants de sa vie conforteront Pierre Faraggi dans sa vocation d’enseignant. Durant son service militaire en Algérie, en 1960, il est chargé de créer une école communale pour une centaine d’enfants des villages voisins. Non content de s’improviser instituteur, il doit aussi prendre en charge l’intendance et l’accompagnement des enfants au quotidien, et ce rôle le ravit. Plus tard dans sa vie, un séjour à l’hôpital le convainc de l’utilité de la musique aux côtés des patients et des soignants : par reconnaissance envers l’équipe qui l’a soigné, Pierre Faraggi crée Musique à l’hôpital, qui connaît ses premiers succès dans le service de maternité, où un andante de Mozart se révèle le meilleur remède pour calmer les bébés survoltés ! Les concerts sont d’abord destinés aux soignants puis s’ouvrent au grand public, qui découvre qu’on peut aussi aller à l’hôpital pour y entendre Beethoven et Chopin. Parallèlement, l’ambition d’enseigner au plus haut niveau pousse Pierre Faraggi à retrouver l’École normale de musique de Paris, cette fois comme professeur. Un concert donné salle Gaveau par une éblouissante élève de dix ans décuple la notoriété de son professeur, qui se lance alors dans une série de projets discographiques, nés de son expérience auprès des élèves. Il est temps pour lui de revenir aux fondamentaux de sa relation avec le piano…
Jouer et transmettre
En 2012, Pierre Farragi décide de se consacrer à son talent personnel, ou plutôt à ses deux talents, de pianiste et de pédagogue. Au sein de son école, créée à Saint- Cloud en 1971, et qui fêtera donc cette année ses cinquante ans, il privilégie désormais des amateurs avancés, enfants et adultes, choisis pour leur motivation et leur forte capacité de travail. Aux côtés de ses jeunes élèves, la différence d’âge s’estompe dans la joie de la musique partagée. Lui qui fut lauréat de la Fondation de la Vocation donne des master class, qui remportent chaque fois un beau succès. De nouveaux disques paraissent sous le label créé par Pierre Faraggi lui-même : une sélection, pour chaque compositeur, de pages accessibles aux apprentis pianistes, interprétés par leur maître, qui poursuit là son oeuvre de pédagogue tout en approfondissant son intimité avec Chopin, Schumann, Schubert… Prochain projet, en cours d’élaboration : un disque consacré aux pièces pour piano de Bach, dont, bien sûr, des pages du Clavier bien tempéré, des Inventions à deux et trois voix, du Petit Livre d’Anna Magdalena Bach… Pierre Faraggi se décrit comme « toujours aussi ardent à entreprendre, agir, imaginer », et son enthousiasme face à ce triptyque est intact. Face à son clavier, au coeur de la ville où il a tissé tant de liens et qui l’accompagne dans tous ses projets, l’énergie du pianiste-professeur dessine une ligne de vie orientée par la vocation d’un passeur de notes.